La saga des frères Sarkozy
Article placé le 28 oct 2010, par Mecanopolis
On
parle beaucoup de conflits d’intérêts dans la vie politique ces
derniers temps. Des amitiés de Nicolas Sarkozy avec le milieu de la
finance et des médias, de l’affaire Woerth-Bettencourt aux récentes
révélations du livre de Martin Hirsch, mais les journalistes « officiels
» oublient aussi d’autres évidences. Alors que le déficit prévisionnel
de la Sécurité Sociale a été annoncé cette semaine et qu’une diminution
des remboursements est d’ores et déjà au programme, il est temps de se
pencher sur le secteur de la santé, de comprendre son fonctionnement, et
surtout d’en connaître les acteurs.
Le Pôle
Emploi, né de la fusion de l’ANPE et de l’ASSEDIC sur une idée de
Nicolas Sarkozy, compte 50.000 employés. La Sécurité Sociale, comprenant
l’Assurance Maladie, l’Assurance Vieillesse et les URSSAF compte
120.000 employés. Ces deux organismes ont été concernés par une réforme
récente concernant les Complémentaires Santé. Ainsi, depuis le 1er
janvier 2009, 170.000 employés ont été contraints de résilier leurs
contrats avec leurs mutuelles pour adhérer à une « mutuelle employeur
obligatoire ». Ceux qui ont des enfants ont également été obligés
d’inscrire ces derniers sur le nouveau contrat (sauf s’ils étaient déjà
ayant-droits sur le compte du conjoint via une mutuelle employeur
obligatoire). On peut appeler ça du passage en force. C’est une
conséquence de la loi Fillon de 2003.
Ce qui est
encore plus étonnant, c’est de constater que c’est le même organisme
qui a remporté les deux marchés. Je ne connais pas les modalités des
appels d’offre mais je m’étonne de voir que c’est le groupe
Malakoff-Médéric qui a raflé la mise, obtenant d’un coup, d’un seul,
170.000 adhérents supplémentaires, sans compter les ayant-droits.
Ajoutez à cela les 800.000 salariés CHR (café-hôtellerie-restauration)
qui rentreront dans le dispositif en janvier 2011… c’est encore Malakoff
Médéric qui a emporté le marché. Revenons donc sur l’histoire de cette
compagnie d’assurance et de prévoyance pour comprendre un peu mieux les
enjeux.
Pour vous
donner une idée du poids de Malakoff-Médéric sur le marché français,
c’est le n°1 des groupes paritaires de protection sociale, n°2 de la
retrait e complémentaire et n°3 en santé collective (classement Argus de
l’Assurance). Le groupe est né de la fusion de Malakoff et Médéric
(d’où son nom) le 30 juin 2008, soit 6 mois avant la mise en place du
dispositif « mutuelle obligatoire employeur » pour la Sécurité Sociale
et le Pôle Emploi. Ainsi, dès le 1er Juillet, le président de Médéric
cède sa place pour laisser seul au commande du groupe, le président de
Malakoff : un certain Guillaume Sarkozy. Ce dernier est loin d’être un
inconnu : au Medef de 2000 à 2006, il a aussi été le vice-président de
la CNAM de 2004 à 2005. Guillaume Sarkozy, comme son nom l’indique, est
le frère de Nicolas.
Puisque
j’évoque la fratrie Sarkozy, intéressons-nous maintenant au troisième
larron : François Sarkozy. Pédiatre de formation, François a abandonné
la pratique de la médecine pour se consacrer à l’industrie
pharmaceutique (principalement orientée vers la gériatrie) depuis 2001.
Ainsi, il siège au conseil de surveillance de Bio Alliance Pharma et est
devenu le président d’AEC Partners dont une des missions est le conseil
aux fonds d’investissement.
Par
ailleurs, François Sarkozy a également lancé une chaîne de télévision
spécialisée dans la santé sur internet… financée par le laboratoire
Sanofi. Ajoutons à cela ses relations avec le groupe Paris Biotech
Santé, l’un des protagonistes de l’affaire de l’Arche de Zoé, et on
l’aura compris, l’homme a tissé sa toile : il fait partie aujourd’hui
des puissants lobbyistes de l’industrie pharmaceutique. D’ailleurs le
grand plan Alzheimer lancé par le gouvernement est un joli cadeau de
quelques centaines de millions d’euros, une aubaine pour le secteur dont
il défend les intérêts.
Et
maintenant la cerise sur le gâteau, celui dont on ne parle jamais, le
cerveau, l’éminence grise : Olivier Sarkozy (demi-frère de Nicolas
Sarkozy), qui copilote depuis avril 2008 l’activité mondiale de services
financiers de Carlyle Group (), probablement celui qui tire les
ficelles. Le Groupe Carlyle est
une société d’investissement américaine fondée en 1987. Basé à
Washington D.C., il est présent dans de nombreux domaines d’activités,
comme l’aéronautique, la défense, l’industrie automobile et des
transports, l’énergie, les télécommunications et les médias. Ses
investissements sont essentiellement situés en Amérique du Nord, en
Europe et en Asie du Sud-Est. Le groupe possède 89,3 milliards de
dollars de capitaux propres et il emploie plus de 515 professionnels de
l’investissement dans 21 pays. Les
différentes entreprises de son portefeuille emploient, quant à elles,
plus de 286 000 personnes dans le monde et Carlyle a environ 1 100
investisseurs répartis dans 31 pays à travers le monde.
Pour
rappel, le groupe Carlyle a ou a eu parmi ses membres actifs l’ancien
Premier ministre britannique John Major, James Baker, ancien secrétaire
d’État américain, George Bush père, ancien directeur de la CIA et ancien
président des États-Unis, Frank Carlucci, ancien directeur de la CIA et
secrétaire à la Défense américain, Karl Otto Pöhl, ex-président de la
Bundesbank, la famille Ben-Laden et plusieurs chef d’État et de
gouvernement.
Le groupe
Carlyle n’est pas coté en Bourse, et n’est donc non tenu de communiquer à
la Securities and Exchange Commission (la commission américaine chargée
de veiller à la régularité des opérations boursières) le nom des
associés, des actionnaires, pas plus que le nombre de leurs parts
respectives.
4 frères :
Le cerveau qui copilote l’activité mondiale des services financiers
d’une multinationale tentaculaire, l’un en charge de l’exécutif de la
France, notre Président, l’un à la tête d’un des plus gros groupe
d’assurance santé et le dernier qui sert les intérêts des laboratoires.
Si ça ne s’appelle pas un conflit d’intérêt, je me demande ce que c’est…
Pourtant les médias en parlent peu et préfèrent s’étendre sur les amis
milliardaires de Nicolas Sarkozy. On peut légitimement nourrir des
inquiétudes sur l’avenir de notre pays. Les réformes engagées depuis
2004 ne font que confirmer sa détérioration et l’on peut prédire le
démantèlement de toutes nos structures sociales et services publiques
d’ici quelques années.
Publié sur Mecanopolis le 28 octobre 2010Télécharger le document original au format PDF
Illustration issue de blogcpolitic
NB : Nous avons reçu ce document PDF par email dans un « mailing ». Il semblerait qu’il ait été largement inspiré par l’article de ce blog.
Commentaires
Enregistrer un commentaire